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AUBERGE DE LA TÊTE NOIRE, PAUL SANDA, éditions Rafaël de Surtis, 2019 (note parue dans « Diérèse » 79, été-automne 2020)

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   Le titre évoque plutôt un polar. Il s’agit pourtant bien d’une autobiographie poétique d’enfance, tel qu’indiqué sur la couverture. Cinq ans après Célébrations des nuées, récit en prose entrecoupé de vers, Paul Sanda décide de revenir sur sa propre existence, en parlant cette fois de son jeune âge. Le résultat est surprenant, et bien éloigné des précédents livres, qu’il s’agisse du fond ou de la forme. Sur la forme, nous sommes loin des images flamboyantes, parfois surréalistes, propres aux précédents opuscules. Le ton est ici beaucoup plus mesuré, non pas terne, mais tout simplement vrai. En vers narratifs libres parfaitement limpides, P. Sanda narre son enfance à Saint-Georges-sur-Loire, dans la campagne angevine, au bord du célèbre fleuve cher à Julien Gracq. Logé, avec sa famille, dans une maison au confort spartiate, le jeune Paul explore le bourg ainsi que les environs, créant ainsi son propre paysage mental. Croisée quatre fois par jour dans l’aller jusqu’à l’école, une étrange tête noire, sculptée au fronton d’une auberge, fait office de Minotaure dans le labyrinthe de la mémoire. Marqué par le mystère chrétien (p. 22) lors de la messe dominicale, Paul nourrit également sa mythologie personnelle de nombreuses lectures, comme Tom Sawyer, ou de films classiques, comme Alexandre Nevski, ou tout simplement de visions, fragments devenus images, réminiscences d’un rêve éveillé. Ainsi se dessine l’itinéraire d’un futur écrivain, amoureux du livre, seul outil de tempérance (p. 17), à jamais marqué par la fiction, les contes populaires, et qui aime à s’inventer une seconde vie, tournée vers le passé, un Moyen Âge fantasmé, nervalien : Grand-mère fut chambrière à Serrant (Château),/elle en rapporta, avant-guerre, une tapisserie,/faite d’une légende brodée à la main. Une/scène de chasse qui hanta mes nuits &/occupa mes jours, inventant mon admiration (p. 23). Magnifiée à chaque page, la Nature occupe également une place centrale dans le méandre des souvenirs, pour se transformer en personnage à part entière. Mystique, mais aussi panthéiste, P. Sanda sait à merveille chanter les saisons, les senteurs et les couleurs, soit la docilité de la terre/aspirant la pluie, les animaux du sol, les roses/mauves & le si beau carré de cyclamens. (p. 29).

   Récit initiatique orné de photographies rétro, récit de formation, ce nouveau livre, publié par l’intéressé aux très belles éditions Rafaël de Surtis, surprendra probablement certains lecteurs, habitués aux essais théologiques ou ésotériques. Ici, il s’agit essentiellement de se raconter, de raconter son parcours personnel, mais aussi celui de la famille, de ce père étudiant à la Catho, de l’arrière-grand-mère Berthe, du sol ancestral (p. 33). Si l’enfance est parfois morose, bonnet d’âne (p. 28) ou frustration (p. 25), les vingt-trois poèmes de ce magnifique volume en restituent la subtile essence, à l’imparfait, non sans une pointe de douce mélancolie.


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