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VOIX DES AUTEURS: JÉRÔME DUWA NOUS PARLE DE ROBERT LEBEL (entretien paru dans « ActuaLitté », août 2023)

La troisième horloge : Robert Lebel, auteur méconnu du surréalisme

Disparu il y a presque quarante ans, Robert Lebel (1901-1986), demeure totalement inconnu du grand public. Critique, auteur proche du mouvement surréaliste, l’homme, qui a notamment fréquenté Duchamp, Lacan et Breton, a pourtant beaucoup commenté, beaucoup écrit. Docteur ès Lettres, spécialiste du surréalisme et membre de l’association « Les amis de Benjamin Peret », Jérôme Duwa a résolu de publier les œuvres complètes de l’intéressé. Après le tome I, paru en 2016 (Le Surréalisme comme essuie-glace 1934-1984, éditions Mamco), intéressons-nous au second volume, La troisième horloge, récemment imprimée par l’Atelier contemporain.

ActuaLitté

Peux-tu, pour commencer, nous présenter Robert Lebel?

Robert Lebel (1901-1986) fut tout à la fois critique d’art, poète, essayiste et, de profession, expert en peinture ancienne. Son nom est passé (discrètement) à la postérité en raison de son livre Sur Marcel Duchamp (1959), écrit du vivant de l’intéressé et dans une relation de grande connivence intellectuelle. Depuis la Seconde Guerre mondiale, il a entretenu des liens privilégiés avec plusieurs acteurs importants de la nébuleuse surréaliste, en particulier André Breton, mais aussi Max Ernst, Dorothea Tanning, Man Ray ou encore Michel Waldberg et Isabelle Waldberg, dont il a été tout particulièrement proche.

Il s’agit là du deuxième tome de ses œuvres complètes. Or, l’écrivain semble aujourd’hui quelque peu oublié, à la différence d’autres surréalistes (Breton, évidemment, mais aussi Robert Desnos ou René Char). Comment expliquer cette désaffection?

Le rayonnement de certaines œuvres qui se sont formées au sein du mouvement surréaliste et éventuellement s’y sont maintenues (ce qui est rare) tient à divers facteurs littéraires et extralittéraires. Une postérité se construit. Première difficulté : Robert Lebel n’a pas souhaité « jouer le jeu » pour parvenir à la reconnaissance en tant qu’écrivain consacré. Comme les dadaïstes et les surréalistes, il revendiquait un franc mépris à l’égard de la réussite littéraire.

Par ailleurs, il ne vivait pas de l’écriture (on en vit plutôt mal en général), puisque sa profession très absorbante était celle d’un expert en peinture. Au début de son Journal d’une démystification (1975-1986), il revient sans faux-fuyants sur son obscurité en tant qu’écrivain. Il admet avoir fait le choix de demeurer quasi inconnu, sauf parmi quelques très proches, mais il interroge aussi la sincérité de son dégoût pour la littérature parvenant à la notoriété.

N’oublions pas que lorsque Robert Lebel publie son livre sur Duchamp en 1959, ce nom et ce qu’il représente n’est rien moins qu’installé dans l’opinion publique ; les institutions artistiques n’y prêtent pas la moindre attention. Dans ce volume, La troisième horloge, on peut également remarquer que Robert Lebel n’a de cesse de défendre l’œuvre littéraire de son ami Michel Fardoulis-Lagrange (1910-1994), un auteur qui appartient aussi à cette confrérie des très grands oubliés. Robert Lebel aimait peut-être les causes perdues d’avance garantissant un secret durable. « Toutes les idées qui triomphent courent à leur perte » a écrit Breton (Prolégomènes à un troisième manifeste du surréalisme, ou non, 1942) : cette phrase de haute lucidité et de profonde inquiétude, l’a durablement marqué.

Là réside le paradoxe : écrire au sujet de Duchamp ou de Fardoulis-Lagrange revient à prendre le risque d’ébruiter le secret, de contribuer à une reconnaissance et, par conséquent, à un malentendu. Se trouve alors soulevée une question que le mouvement surréaliste n’a pas manqué de se poser : faut-il jeter le « pain maudit aux oiseaux » ?

Robert Lebel est d’abord connu en tant que critique d’art. Cet aspect apparaît pourtant peu dans La troisième horloge. Ce rôle d’essayiste n’a-t-il pas finalement effacé le travail proprement créatif de l’auteur? Le fait qu’il soit capable d’écrire de la fiction, qu’il ait également écrit des nouvelles?

Plus nombreux, les textes adoptant un point de vue de critique d’art ont été publiés pour partie dans le premier tome qui a paru au Mamco (Musée d’art moderne et contemporain de Genève, alors dirigé par Christian Bernard) en 2016 sous le titre : Le Surréalisme comme essuie-glace, 1943-1984. Le tome II, qui vient de paraître au printemps de cette année, a vocation à se concentrer sur la part la moins connue de l’œuvre de Robert Lebel qui est peut-être aussi la plus étonnante : ses récits et écrits relevant, pour simplifier, de la littérature.

Pour qualifier ses textes les plus personnels, auxquels il a pu consacrer de son temps très tardivement dans sa vie, je préfère en l’occurrence les termes de « poésie » ou de « récit ». Il n’y a pas eu effacement des fictions par les essais. Simplement, Robert Lebel avait déjà une place officielle dans le milieu de l’art, son affirmation y était en quelque façon favorisée.

J’espère vivement que ce recueil, La troisième horloge, arrive encore à temps pour contribuer à la reconnaissance d’un auteur singulier qui a légitimement toute sa place dans ce courant ascensionnel et heureusement chargé de turbulences qu’on nomme surréalisme depuis 1924.

Les livres de Lebel ne sont pas encore tombés dans le domaine public. Comment se sont donc passées les choses, très concrètement, pour cette réédition? Comment as-tu contacté les maisons? Les ayants droit?

Comme toute entreprise éditoriale d’envergure (quatre tomes prévus !) et d’ambition scientifique concernant un écrivain marginal, le projet a une histoire au long cours faite, de rebondissements. En travaillant à ma thèse à l’IMEC (Institut Mémoires de l’Édition Contemporaine) au début des années 2000, j’ai exhumé un tapuscrit du Journal d’une démystification (alors inédit) de Robert Lebel, alors même que je classais les vastes archives de Jean Schuster. Ce texte m’a tout de suite semblé important.

J’en parle à Olivier Corpet (1949-2020), alors directeur de l’IMEC et, quelque temps après, j’entre en contact avec Jean-Jacques Lebel, le fils de Robert, avec qui je travaille régulièrement depuis lors. Nous rencontrons ensemble Christian Bernard (directeur du Mamco) qui connaît de près l’histoire du surréalisme et qui nous propose, à ma grande surprise, d’établir les œuvres complètes de Robert Lebel, plutôt que de faire un choix de quelques textes. C’est un peu intimidant. Je me lance dans l’aventure avec enthousiasme. L’accord et le soutien continu de Jean-Jacques Lebel me sont acquis.

Des années ont passé entre le moment où j’ai découvert le tapuscrit, donc, et la parution du premier tome, en 2016, puis du second, en 2023, à L’Atelier contemporain de François-Marie Deyrolle, lequel avait déjà par le passé édité des textes de Robert Lebel. Malgré les obstacles et les difficultés, les écrits se transmettent et passent entre de bonnes mains ! Ce n’est sans doute pas un hasard si les deux éditeurs successifs de ces œuvres complètes sont, l’un comme l’autre, en constante circulation entre la littérature ou la poésie et les arts plastiques.

Pour lire l’entretien en intégralité:

https://actualitte.com/article/113172/interviews/la-troisieme-horloge-robert-lebel-auteur-meconnu-du-surrealisme

UN ARTICLE SUR « ANIMAUX » DANS LES CAHIERS BENJAMIN PÉRET!

Merci à Jérôme Duwa pour sa note de lecture autour d’Animaux, dans les Cahiers Benjamin Peret numéro 10. Très intéressant, le périodique contient notamment un article sur la traduction de Péret en persan! Pour commander la revue:

https://www.benjamin-peret.org/qui-sommes-nous/publications/cahiers-benjamin-peret.html

« De la zoologie à la tératologie, il n’y a qu’un pas. Animaux propose l’ébauche d’un dictionnaire répertoriant quelques créatures ayant échappé à la sagacité des spécialistes. On croyait à tort connaître les « Baignoires », les « Truffes », ou les « Disques », alors qu’on ignorait tout de leur vie animale. De même pour les fameux « Bourgognes », ces escargots de taille prodigieuse qu’il est parfois nécessaire d’abattre d’une balle entre les deux cornes. De triste mémoire (quel souvenir nous ont-ils laissé au juste?), on évitera de mentionner ici les « Brains », ou, pire peut-être, les « Kraps » à l’inoubliable puanteur. Bienvenue parmi les cauchemars d’Etienne Ruhaud« 

ÉVÉNEMENTIEL DE DÉCEMBRE 2018

Chers lecteurs,

21/06/1991. STUDIO: CLAUDE COURTOT, ECRIVAIN

   Le jeudi 13 décembre, un hommage sera rendu au surréaliste Claude Courtot à la librairie « Les éditeurs associés », dans le VIème arrondissement de Paris (11 rue Médicis). Tout est indiqué ci-dessous. Retrouvez également ma biographie de l’écrivain. Membre de l’association des amis de Benjamin Peret, je serai naturellement présent (pour me contacter er10@tutanota.com)

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Le samedi 15 décembre, je serai à Meaux, en compagnie de mes amis Pascal Mora et Claudine Sigler, afin de lire des textes.