Je me demande si Flammarion va m’envoyer un service de presse d’Anéantir. Ils l’avaient fait pour Sérotonine, en 2018, puisque j’avais reçu le roman quelques jours avant sa sortie officielle. Je peux lire l’ouvrage d’une manière ou d’une autre, mais me sens séduit par le nouveau format imaginé par Houellebecq (cartonné, en dur, assez chic). J’aime aussi la longueur de l’ouvrage: 730 pages, soit nettement plus que les récits cachectiques que je lis bien souvent. L’homme ne s’est pas moqué de nous. A voir aussi s’il ne s’agit pas de remplissage, comme ce fut le cas pour La carte et le territoire. Du moins dans la dernière partie, très inspirée par le néo-polar à la Jonquet, en moins bon. Cela m’arrangerait quelque peu, en fait, qu’ils ne me l’envoient pas, car alors je ne me sentirais pas obligé de produire un papier, ce qui implique du travail, de la concentration, quand j’ai tant à faire par ailleurs (finir mes critiques, finir mes livres, faire des entretiens, publier pour « Eléphant blanc »). Etrange. Je me sens déjà comme intimidé par la taille du volume, par le fond.
En attendant je pense vraiment qu’on gagnerait à LIRE vraiment ce qu’écrit Houellebecq, quitte à le dénigrer par la suite. Je veux dire: on a parfaitement le droit de ne pas l’aimer ou simplement d’y être indifférent. Je suis moi-même sceptique bien souvent, vois bien qu’il y a un fond de manipulation derrière tout cela, que la presse en fait trop (j’en participe en parlant de lui. Sauf que je ne suis pas la presse et n’ai aucun pouvoir décisionnaire). Je n’écoute pas les gens qui n’ont pas lu. Point barre. Si le seul argument, c’est « oui c’est un réac et en plus c’est commercial », (en sous-entendant qu’on est nécessairement dans le camp du Bien, et comme si Houellebecq faisait du Zemmour light), aucun intérêt. On ne peut pas évoquer sérieusement un auteur qu’on ne connaît pas intimement, ou un pays dans lequel on n’a jamais mis les pieds. J’aime, à titre privé, et quand j’ai le temps, remonter à la source, soit au texte même: Houellebecq, donc, Rose bonbon, Richard Millet, Sacher-Masoch, L.F. Céline ou Les versets sataniques. Afin de savoir de quoi on retourne, quitte à condamner par la suite.