Il y a quarante ans, dans la nuit du 1er au 2 novembre 1975, Pier Paolo Pasolini était assassiné sur la plage d’Ostie. Tué à coups de bâton, écrasé par sa propre voiture de sport. Ainsi s’achevait une existence brève, passionnée et sombre. De nombreux doutes subsistent: qui a tué le poète? S’agit-il d’un complot, d’un meurtre politique, ou d’une simple aventure sexuelle ayant mal tourné? Pareilles incertitudes font naturellement le régal des complotistes. Loin de nous l’idée de répondre à ces questions, ni même de dresser une biographie complète de ce fascinant auteur, cinéaste et écrivain, quand d’autres s’y emploient fort bien. Disons juste que j’ai eu le bonheur de croiser Pasolini, ou plutôt son reflet, un matin de juillet 2015, dans une station de métro, à Naples, ville qu’affectionnait probablement cet enfant du Nord.
Le jour de ma mort
Dans une ville, Trieste ou Udine,
le long d’une allée de tilleuls,
au printemps quand les feuilles
changent de couleur,
je tomberai mort
sous le soleil qui brûle
blond et haut,
et je fermerai les yeux,
laissant le ciel à sa splendeur.
Sous un tilleul tiède de verdure
je tomberai dans le noir
de ma mort qui dispersera
les tilleuls et le soleil.
Les beaux jeunes garçons
courront dans cette lumière
que je viendrai de perdre,
essaimant des écoles,
les boucles sur le front.
Je serai encore jeune
en chemise claire,
les cheveux tendres en pluie
sur la poussière amère.
Je serai encore chaud,
et courant sur l’asphalte
tiède de l’allée,
un enfant posera sa main
sur mon ventre de cristal.
(La meilleure jeunesse, Suite frioulane © poésie/Gallimard, 1995, p. 45)
Il giorno della mia morte
In una città, Trieste o Udine,
per un viale di tigli,
quando di primavera
le foglie mutano colore,
io cadro’ morto
sotto il sole che arde,
biondo e alto,
e chiudero’ le ciglia
lasciando il cielo al suo splendore.
Sotto un tiglio tiepido di verde,
cadro’ nel nero
della mia morte che disperde
i tigli e il sole.
I bei giovinetti
correranno in quella luce
che ho appena perduto,
volando fuori dalle scuole,
coi ricci sulla fronte.
Io saro’ ancora giovane,
con una camicia chiara,
e coi dolci capelli che piovono
sull’amara polvere.
Saro’ ancora caldo,
e un fanciullo correndo per l’asfalto
tiepido del viale,
mi posero’ una mano
sul grembo di cristallo.
Un article assez complet sur la mort de Pasolini, dans « Télérama » (cliquer sur le lien)
Biographie de Pasolini sur Wikipédia (cliquer sur le lien)